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Patrimoine
Il était une soie en Touraine...

Il y a près de cinq siècles, l’élevage du Bombyx mori - le ver à soie - faisait de Tours la capitale de la soie. Difficile à croire quand presque toutes les traces de ce patrimoine ont disparu.

C’est une partie de l’histoire de la Touraine presque oubliée. Pourtant la sériciculture – l’élevage du ver à soie – a jadis occupé près d’un tiers de la population tourangelle, dont une majorité de paysans. Au XVe siècle, la soie, très prisée, est importée d’Italie. Pour réduire les dépenses et la dépendance vis-à-vis des Italiens, le roi Louis XI décide de développer une production sur son territoire. Son projet de manufacture à Lyon se heurtant à des protestations, il décide en 1470 de le déplacer à Tours où il est installé au château de Plessis-lès-Tours. Ainsi, il fait de la cité tourangelle le berceau de la sériciculture française.

Petit ver, grand appétit

Le ver à soie ou Bombyx du mûrier, comme son nom l’indique, se nourrit de feuilles de mûrier. Michel Bertrand, originaire de Véretz et auteur du « Ver à soie véretzois », s’est intéressé de près à la sériciculture dans sa ville natale. « Pour faire éclore les œufs ou “graines”, on les mettait près du corps », explique-t-il. « Les femmes les couvaient. Elles mettaient les graines dans des poches, sous leurs vêtements. Il leur fallait une température constante et faire correspondre l’apparition des feuilles de mûriers à l’éclosion des œufs. » Le cycle de vie du ver à soie dure un mois, pendant lequel il mue quatre fois et ingurgite près de 1,3 tonne de feuilles. « Il leur faut à manger quatre fois par jour, en petite quantité et à des heures régulières. Ils faisaient un bruit d’orage et de pluie en mâchant. » En fin de cycle, le ver s’enferme dans une chrysalide et forme un cocon. C’est ce dernier qui est récolté et déroulé pour obtenir le fil de soie. « Si le papillon sort, il est inutilisable, il faut donc récolter les cocons avant. On les ébouillantait pour qu’ils se conservent », ajoute Michel Bertrand.

Un patrimoine restauré

L’élevage du ver à soie se déroule dans un bâtiment aéré et chauffé : la magnanerie, du terme occitan “magnan” désignant le ver à soie. A Athée-sur-Cher, la mystérieuse tour sur la place de l’église est vraisemblablement une ancienne pigeonnerie reconvertie en magnanerie. L’ApPE (Association pour la protection de l’environnement) s’est mobilisée pour récolter les fonds nécessaires à la restauration de l’édifice ; un projet porté par la mairie, pour la préservation du petit patrimoine. A l’instar d’Athée-sur-Cher, de nombreuses magnaneries sont disséminées en Indre-et-Loire. « Il y a 150 ans, il y avait des mûriers partout », raconte Brigitte Yon, présidente de l’ApPe. « A Véretz, Azay, aux châteaux de Nitray et Chenonceau, à Montlouis… Aujourd’hui ce sont des vignes. C’est une mémoire que l’on a retrouvée. » L’histoire de la soie tourangelle connait une nouvelle période sous le règne d’Henri IV, qui s’intéresse à la sériciculture via l’une de ses favorites, Gabrielle d’Estrées, originaire de Montlouis-sur-Loire. Avec l’aide de subventions, de nombreux mûriers sont plantés, en particulier Place Plumereau, siège de la soierie à Tours. « Jusqu’à son déclin, la production mobilisait énormément de monde. Chaque paysan avait son élevage. C’était l’industrie de la soie », poursuit Brigitte Yon.

Une mémoire à conserver

La sériciculture tourangelle connait des périodes successives de prospérité jusqu’à son déclin au XIXe siècle. La fin du monopole avec la concurrence lyonnaise, les maladies du ver et du mûrier et le désintérêt de la bourgeoisie qui lui préfère des matières moins chères auront raison du ver à soie. « En 20 ans, tout a disparu. Il y avait vingt tisserands à Véretz. En 1886, il n’y en a plus un seul. Ils se sont reconvertis dans la vigne », rapporte Michel Bertrand. « Il reste un mûrier à Véretz. Au château, la magnanerie est en l’état. » De l’élevage du ver à soie ne restent que des traces. C’est tout un savoir-faire qui disparait. « C’était une transmission familiale. Le père élevait, la mère filait aidée par les enfants qui étaient plongés dedans. » Cependant, la soie tourangelle n’a rien perdu de son prestige. Antoinette Roze est la 12ème génération à la tête des soieries Roze, l’une des dernières sinon la seule subsistant en Touraine. « A partir du 19ème siècle, Tours s’est spécialisé dans ce qu’il sait bien faire et avec qualité : la soie d’ameublement », explique-telle. Seulement, la soie tissée dans l’usine n’est plus locale mais importée de Chine. Cela n’efface en rien le passé séricicole de la région qui revit aujourd’hui par l’association Tours Cité de la Soie, présidée par Antoinette Roze.

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