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Covid-19 : les filières tiennent mais grincent

Hissées sur le piédestal de la République, les filières agro-alimentaires remplissent du mieux qu’elles peuvent leur mission : fournir les assiettes de 65 millions de français, soit 195 millions de repas à servir tous les jours. Après une première semaine plutôt sereine, la ferme France connaît ses premières apnées.

L’huile commence à manquer dans certains rouages de la fourche à la fourchette mais pour l’instant le consommateur trouve toujours de tout, y compris des produits qu’il délaisse soudainement comme le fromage de chèvre, les fraises, les légumes frais. Après l’inquiétude des pépiniéristes et des horticulteurs privés de jardineries, après le malaise soudain des vignerons privés de cavistes, d’export et de restaurants, c’est au tour des producteurs de légumes de saison et de fromages fermiers d’avoir des sueurs froides. Qui pour cueillir les asperges, qui pour les acheter avec la fermeture des marchés ?

 

Certains utilisent la méthode radicale comme Denis Raineau, producteur d’asperges à Verneuil-le-Château. La fermeture du marché de Loches, son principal débouché, et les soucis de main d’œuvre l’on conduit à trancher : il récoltera avec les moyens du bord un seul hectare sur les 3,5 ha en état de produire. Les aspergeraies non cueillies seront entretenues comme un capital qui s’exprimera en 2021. Concernant le contact avec le produit : « je prévois de modifier le conditionnement en utilisant des barquettes bois, pour rassurer le consommateur et pouvoir accentuer la vente en supérette ». Comme les asperges, les fraises sont délaissées par les Français qui semblent privilégier la nourriture sèche, ou se cuisant, aux produits frais et consommables crus sans être épluchés.

 

STE MAURE-DE-TOURAINE : LES FERMIERS DANS LA TOURMENTE

Pour les pépiniéristes et les horticulteurs, les producteurs de plants de légumes, la fermeture des jardineries et de la vente sur l’exploitation ont fait l’effet d’une douche froide, lavant leurs espoirs. Dans ces entreprises, la chiffre d’affaire est saisonnier à l’extrême. La vente des plants est exponentielle à partir de la mi-mars. Une flambée qui retourne en braises début juin. Les impossibles livraisons condamnent des millions de plants et priveront les consommateurs-jardiniers d’une précieuse nourriture vivrière. En début de semaine, les producteurs ont eu un peu de baume au cœur en étant autorisés à livrer directement les commandes chez les particuliers.

 

Comme en légumes frais, la fermeture des marchés atteint le cœur des ventes des fromagers fermiers. Trayant chaque jour, les éleveurs qui ne sont pas liés pour partie à une laiterie, assistent à la montée inexorable de leur stock de fromage. Sans solution de filière, le débouché du lait risque d’être rapidement la fosse à lisier ou le fossé. Les solutions temporaires sont explorées comme l’organisation d’un ramassage traité par l’industrie, si ses capacités le permettent, pour une congélation du caillé ou la transformation en produits caprins génériques et UHT.

 

Les éleveurs des troupeaux importants doivent aussi assurer eux-mêmes les inséminations. Cap Gènes propose de déposer les bouteilles d’azote contenant les semences dans les cours de ferme. A chacun ensuite de se débrouiller sans le savoir-faire de l’inséminateur, pour un protocole de mise en place nécessitant deux personnes sans distance de sécurité. L’arrêt du ramassage des chèvres de réforme et des hoquets sérieux dans celui des chevreaux (qui n’ont plus de prix) ajoute un stress supplémentaire aux éleveurs.

 

L’AGNEAU DE PÂQUES EN DÉSHÉRENCE

Autre production dans la tourmente, l’agneau de Pâques. Florent Delculée, 300 brebis à Nouans-les-Fontaines, a renoncé cette semaine à la vente au cadran des Hérolles (86). « Les agneaux ont perdu 70 centimes du kilo vif. A 3 /kg, la perte est de 30 à 50 par bête, c’est ma marge. Je vais les conserver tant que je peux en les rationnant, mais au-delà de 22 kg de carcasse, c’est le déclassement. » La situation se tend aussi dans la filière aval au gré des fermetures d’abattoir. Bourgueil est ouvert mais pour l’éleveur lochois qui pourrait livrer des bouchers locaux, le déplacement de 240 km A-R est trop onéreux. Le drive tient la corde, mais ce commerce profite aux viandes sous vide, les agneaux néo-zélandais sont sur le marché, souvent congelés, et sont avantagés. La France a fermé les importations y compris de l’UE.

 

Les viticulteurs, qui ont combattu le gel de printemps par trois fois cette semaine, subissent les fermetures une à une des circuits de vente dans les cafés, les restaurants, chez les cavistes. Les portes ouvertes resteront closes. Seul le flux vers la grande distribution se poursuit. « Pour combien de temps ?, se questionne Philippe Brisebarre, président de la cave des producteurs de Vouvray. Les grandes références, nous en avons quelques-unes, sont conservées par la GD, mais les consommateurs semblent acheter davantage d’alcools que de vin. La coopérative tourne toujours mais nous arrêtons les tirages pour cause de promiscuité du personnel. Les expéditions sont un casse-tête en l’absence de transporteurs. » Côté cave particulière, les frères Rousseau d’Esvres, privés de portes ouvertes, ont averti leurs clients qu’ils pouvaient venir à la cave sur commande uniquement et s’organisent pour livrer sur une agglomération tourangelle qui inclut l’appellation Noble Joué.

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