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Agronomie
Les fermes d’avenir converties à l’agriculture de « conversation » !

De l’agriculture de conservation à l’agriculture de conversation… il n’y a qu’un pas franchi allègrement par Sarah Singla devant les GDA à Sepmes la semaine dernière.

Ceux qui l’ont déjà entendu reviennent souvent l’écouter. Et les autres pour qui c’est la première fois font le déplacement, attirés par la réputation de la jeune agronome. Car Sarah Singla a des choses à dire. Agricultrice en Aveyron, elle cultive une ferme familiale en non labour depuis 43 ans. « Le sans labour, je suis née dedans et je suis bien incapable de régler une charrue », remarque cette militante du semis direct sous couverture permanente des sols.

Ingénieure agronome, cette jeune conférencière de 35 ans a raconté ce qu’elle fait, ce qu’elle voit sur son exploitation de grandes cultures et ailleurs dans le monde, face à une salle comble d’agriculteurs des GDA Descartes-Ligueil-sud Touraine (et d’étudiants de la MFR de Noyant), jeudi 31 janvier à Sepmes. Au bord du lac de Pareloup, Sarah Singla sème et récolte, parfois deux fois par an, des cultures seules ou en mélanges sur des terrains couverts en permanence de dizaines de plantes choisies en fonction des précédents et de la météo. Couverts, d’été ou d’hiver travaillent en permanence les horizons pédologiques par leurs racines. Les mottes de terre de ses champs offrent à la lumière ce beau brun des terres fertiles, vivantes et filtrantes.

Rompre la malédiction des sociétés agraires

Point de salut sans matière organique dans ces sols où l’eau percole suivant les galeries de vers de terre et les anciens passages racinaires. Des sols grouillant de vie, protégés de la battance qui, année après année, accumulent en profondeur le carbone. Des sols structurés, en cohésion, grâce à la présence de glomaline, ce mucus microbien qui retient limons, sables et argiles comme une colle à papier peint. « Car le sol est un trésor fragile », explique Sarah. La pénétration mécanique casse le lien de la glomaline. De tout temps, faute d’en avoir la conscience et la connaissance, les sociétés agraires ont disparu au fil des siècles une fois leur capital épuisé, érodé. La mémoire des hommes est courte et l’agriculture du 20ème a cru s’affranchir de cette loi alors qu’elle ne faisait que consommer l’effet prairie, avec l’illusion d’un progrès durable entretenue par les phytos, les engrais et la génétique semencière. Après chaque grosse pluie, la couleur des fossés et des cours d’eau rappelle pourtant aux agriculteurs que la fertilité de leurs sols file vers la mer.

Mais il n’y a pas de fatalité. Grâce À l’expérience « de ceux qui ont essuyé les plâtres », l’agriculture de conservation, voire de régénération est désormais en capacité de rectifier le tir.

Pas de faux départ

« L’engagement réussi d’une ferme dans cette voie doit remplir quelques préalables indispensables », souligne Sarah Singla. A commencer par un état des lieux. La réussite du semis direct est conditionnée à la présence d’une terre grumeleuse en surface – c’est-à-dire sans croûte de battance – et d’une circulation sans entrave de l’eau et des racines dans tous les horizons explorables. Dans un volume de terre vivante qui naturellement comprend 50 % d’air, la surface reste en communication avec le fond. S’il y a une compaction, la zone compressée doit être ouverte par temps sec avec des dents droites (Michel). Un travail immédiatement suivi, avant une pluie, d’un semis par un couvert d’exploration rapide de type Bio-max (exemple : tournesol / phacélie / radis/ avoine strigosa / radis struct. / féverole / pois / vesce / lin). Le risque de rémanence des sulfonylurées doit être intégré à la réflexion. Les racines pivots ou fasciculées du mélange vont descendre rapidement et occuper les espaces vides créés par le décompacteur. Après ce préalable, chaque agriculteur par la formation et l’intégration d’un groupe (GDA, APAD, réseau Base…) pourra déterminer sa propre stratégie d’agriculture de conservation. « Car ce mode de conduite est aussi une agriculture de conversation entre collègues, où chacun fait part de son expérience et reçoit celle des autres », résume Sarah Singla.

Mettre le couvert en fin de moisson

Les options de couverts sont multiples, tout comme l’implantation de cultures seules ou associées (luzerne sous blé, lentille sous colza..). Pour le couvert d’été (5 à 6 familles botaniques différentes), la règle est un semis précoce « vraiment » dans le sillage de la moissonneuse. « La trémie du semoir à couverts doit être emplie juste avant la moisson pour éviter les dix jours souvent nécessaires à la réception des semences avec les aléas des vacances. » Pour les semis à la volée avant moisson, dans tous les cas, comme le fait la nature, prévoir un surdosage de semences (+ 20 à 30 %).

Quant aux couverts d’hiver, leur action de protection du sol, de remontées des éléments fertilisants n’est plus à démontrer. En haussant les taux de matière organique, l’agriculture de conservation donne aux plantes un moyen efficace de résister à la sécheresse (et de limiter l’irrigation). « Dans 45 kg de sol sec, un taux de 1,5 à 2 % de MO retient 20 kg d’eau mais 4 à 5 % de matière organique retiennent 80 kg d’eau », rappelle Sarah Singla. L’aspect noir du sol riche en humus influe aussi physiquement sur le réchauffement du sol (+ 1 et + 2°C/à une surface blanche) et tempère la température au sol en plein été. Le respect de la structure poreuse acquise conditionne la durabilité du système. « ll faut éviter de retasser le sol par les passages d’engins en instituant des zones immuables de passages des roues comme le permettent les systèmes de navigation et en laissant les remorques en bordure de parcelles », recommande l’Aveyronnaise.

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