Maturité des raisins : un millésime dans la moyenne
Après une phase de maturité hésitante, quelques jours de soleil ont donné le signe des vendanges des vins de base un peu plus tôt qu’envisagé à la fin du mois d’août. Ceci dit, l’adage ne sera pas tout à fait juste, septembre ne fera pas le vin tant les blessures de ces derniers mois ont marqué le vignoble.
Après une phase de maturité hésitante, quelques jours de soleil ont donné le signe des vendanges des vins de base un peu plus tôt qu’envisagé à la fin du mois d’août. Ceci dit, l’adage ne sera pas tout à fait juste, septembre ne fera pas le vin tant les blessures de ces derniers mois ont marqué le vignoble.

La campagne 2021 a éprouvé les vignerons, comme l’ont rappelé dans toutes les visites de pré-vendanges les conseillers de la chambre d’agriculture et du laboratoire Inovalys.
Globalement, le cumul des températures et l’ensoleillement relevés par Inovalys de la fin mars à mi-septembre se situent légèrement en dessous de ces cinq dernières années avec 2 600 °C jour et 1 211 heures cumulés de mars à fin août. Pour mémoire, avec un coup de chaud précoce en mars suivi d’un printemps froid, sec, avec son cortège de gelées tardives, le millésime 2021 a subi les assauts de la météo avec une accalmie bienvenue au moment de la fleur.
La pluviométrie de la période (339 mm), en s’abattant pour l’essentiel en fin de printemps et début d’été, a favorisé le mildiou. Car si tornade et grêle se sont abattues sur certains vignobles (St Nicolas, Vouvray), le mildiou n’a pas fait de distinction, conduisant les vignerons à trois mois de lutte intense. Conséquence directe, la réduction de la surface foliaire induite par les attaques a ralenti le métabolisme des vignes.
Il ne sera pas simple d’atteindre la maturité optimale dans les trois critères que sont le degré, l’acidité, la maturité des tanins et des matières colorantes. En fin de course, il s’agit de surveiller le botrytis, dont l’évolution pourrait précipiter les vendanges avant l’optimum de maturité.
Dans de nombreux secteurs, le résultat final est à l’image des épreuves. Des rendements bas (- 25 à - 50 %) parfois très bas (- 50 à - 75 %) vont fortement affecter les trésoreries 2022. Les courbes de suivi de maturité du 2021 (degré-acidité) tendent à croiser la moyenne des millésimes de ces 30 dernières années. L’outil d’aide à la décision Prévimat (Techniloire) plaçait le curseur de maturité en cabernet franc de deux parcelles chinonaises au 28 septembre à 48 pour la première et à 52 pour la seconde à la même date. « La maturité technologie sera atteinte à la fin du mois, ce qui est peu probable pour la maturité phénolique », prédit Bruna Marti-T du laboratoire Inovalys.
VINIFIER EN DOUCEUR
Pour les vignerons confrontés à une pénurie de main- d’oeuvre saisonnière, la difficulté des vendanges réside souvent dans l’extrême hétérogénéité de maturité, d’un cep à l’autre, d’une grappe à l’autre, et parfois même au sein d’un même grappe. Manon Thaunay, conseillère de la chambre d’agriculture, a rappelé lors des rencontres de pré-vendanges « l’énorme variabilité dans les stades phénologiques suite aux épisodes de gel. La détermination des stades atteints a été rendue complexe par les différents aléas climatiques de la campagne 2021. »
« L’évolution de l’acidité est bonne, explique pour sa part Philippe Gabillot. En fonction de la météo, le recours à l’enrobage voire à la chaptalisation n’est pas exclu, il faut vendanger mûr mais pas pourri. Avec le botrytis en embuscade, le risque de bascule soudaine, comme en 2014, est réel. » Et l’oenologue de conseiller la modération s’agissant des enzymes d’extraction : « Cela nécessitera de travailler les fins de presse avec des collages spécifiques pour éliminer les composés oxydés et amers par le biais de l’hyperoxygénation et des colles, pois, PVPP, patatine, gélatines. En blanc, il faudra y aller mollo sur le SO2 du fait des fortes acidités. Gare aux tanins durs. Mieux vaut privilégier la bioprotection. L’acidité pourra être masquée en laissant aller les malos en blancs. L’utilisation des copeaux en blancs comme en rouges n’est pas à exclure durant les fermentations. L’équipe viticole conseille de privilégier l’extraction douce par infusion, à la place des délestages ou des remontages, et d’exclure les protocoles sans soufre sur rouges botrytisés. Le mot d’ordre, c’est la recherche de volume et de gras pour masquer un climat difficile. »