Fenaison
ALIMENTER SON TROUPEAU FACE À UNE POUSSE DE L’HERBE EN MUTATION
Inévitablement, le changement climatique a un impact sur les cultures fourragères. Cette évolution de la pousse de l’herbe devrait même s’amplifi er dans les prochaines décennies. Tour d’horizon des changements à prévoir, avec un conseiller du réseau Herbe et fourrages de la chambre d’agriculture de l’Indre.

Bien que le changement climatique ait tendance à radoucir les hivers, il n’est pas rare de rencontrer des gelées tardives, fi n mars début avril. Ces gelées printanières, accompagnées bien souvent d’une pluviométrie assez faible, entraînent un démarrage de la pousse de l’herbe plutôt délicat courant avril. « Le réchauffement climatique n’entraîne donc pas systématiquement une mise à l’herbe des animaux plus précoce. Il faut être opportuniste en fonction du démarrage de la pousse », résume Jean-Baptiste Quillet, conseiller en fourrage à la Chambre d’agriculture de l’Indre. Les périodes estivales, de plus en plus chaudes avec des températures qui atteindront régulièrement les 40°C, engendreront un allongement des interruptions de pousse de la végétation. « Dans les scénarios extrêmes, la pousse de l’herbe pourrait être ralentie de mi-juin à fi n septembre », avance-t-il. Même si des précipitations orageuses apparaissaient, de telles températures sur la durée généreraient une importante évaporation et auraient donc un effet bénéfique limité sur la pousse de l’herbe.
PLUS DE FOIN EN STOCK
Cette pousse de l’herbe, moindre en été, entraînera inévitablement un allongement de l’affouragement au râtelier, et donc un besoin en stock fourrager plus conséquent. Demain, l’enjeu majeur pour les éleveurs sera donc de réussir à réaliser l’intégralité des fourrages entre le 15 avril et le 15 juin. « Sur une surface équivalente, il faudra faire plus de foin sur une fenêtre d’intervention plus restreinte. L’optimisation des prairies restera donc une nécessité, résume Jean-Baptiste Quillet. Cette notion d’optimisation ainsi que la lutte contre le gaspillage sont les défi s que doivent relever les éleveurs dans les prochaines années. » Car, « nourris plus longtemps au râtelier l’été, les animaux ont tendance à gaspiller davantage », complète-t-il. Tous ces facteurs requièrent un besoin en matière sèche (MS) de fourrage stocké supérieur. « Là où, il y a dix ans, il fallait 2 tonnes de MS stockées par UGB pour assurer l’année, il en faut désormais 2,5 tonnes aujourd’hui », précise-t-il.
DE L’HERBE PLUS LONGTEMPS EN FIN DE SAISON
La pousse de l’herbe en période automnale évoluera elle aussi. « L’herbe redémarrait début septembre il y a encore une décennie. Dorénavant, et plus es années passeront, ce démarrage automnal sera retardé aux alentours du 15-20 septembre, prédit Jean-Baptiste Quillet. En revanche, nous aurons une bonne pousse d’herbe courant octobre, comme nous l’avons vécu l’an passé. » Reste que la climatologie automnale est moins propice à la valorisation de l’herbe. En effet, les jours plus courts avec des temps de séchage limités compliquent les chantiers de fauche à cette époque de l’année. Effet similaire sur le pâturage où les animaux sont parfois amenés à retrouver les bâtiments, notamment pour les vêlages. Sans oublier que la portance des sols peut s’avérer plus délicate en cas de fortes précipitations. Une fois encore, les éleveurs doivent s’adapter au réchauffement de la planète. Un pic de travail encore plus prononcé en avril et mai est à prévoir, à cause de fenêtres d’intervention de travaux de fenaison raccourcies. Une période de cessation de pousse estivale plus longue, et donc une durée d’alimentation au râtelier allongée, entraînera (et entraîne déjà) une consommation et une production de fourrages plus importantes.