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Erables canadiens, érables européens

Une feuille stylisée, rouge sur fond blanc, tel est l’emblème du Canada.  Elle orne les édifices officiels, l’aile des avions de la compagnie nationale et autres éléments symboliques. Cette feuille, c’est celle de l’érable.

L’érable en automne : une démonstration d’or et de rouge, de jaune et d’orange, de toutes sortes de coloris qui flamboient dans le ciel bleu.

Au Canada, l’érable (Acer sp.) est apprécié de tous. Surtout l’automne, quand il brille de tous ses feux et que ses dix espèces autochtones, auxquelles s’ajoutent celles venues d’ailleurs, se mettent à détailler le subtil nuancier de leurs chaudes couleurs. C’est alors une démonstration d’or et de rouge, de jaune et d’orange, toutes sortes de coloris qui flamboient dans le ciel bleu. Ces coloris ne sont jamais aussi éclatants qu’en ce court moment - quelques semaines tout au plus - prélude à l’hiver déjà en embuscade et à ses six mois de blanc quasi continu. Plus prosaïquement, ils sont dus à des pigments anthocyanines (tons rouges) et caroténoïdes (tons jaunes et oranges), présents dans les feuilles lorsque s’évanouit la chlorophylle. Il n’empêche que l’œil émerveillé ne se lasse jamais de ce festival de couleurs unique au monde. Les érables peuplent « la Belle Province » de Québec : on les voit partout, sur les pentes pierreuses des vastes massifs montagneux, près des maisons propres comme des sous neufs, dans les parcs bien léchés.

PRODUCTEUR DE SUCRE

Il n’est pas étonnant que, mêlé à l’immuable vert sombre des conifères, l’érable si flamboyant attire autant le regard. Mais il vaut également pour un autre fait d’armes : il fournit du sucre, le fameux « sirop d’érable », qui s’obtient par ébullition de la sève. Artisanale et aussi vieille que les peuples autochtones, la technique consistait à recueillir la sève à la « saison des sucres » (qui, grosso modo, court de mi-mars à fin avril) ; puis, les premiers colons européens qu’attirait cette manne juteuse, la perfectionnèrent, destination le commerce. François-René de Chateaubriand écrivait : « Cette sève de l’érable étendue dans l’eau de fontaine offre une liqueur fraîche pendant la chaleur de l’été »*. Si toutes les espèces, peu ou prou, sont concernées, c’est surtout l’érable à sucre ou érable franc qui donne lieu à cette industrie, quasi unique au monde : à lui seul, le Canada, et surtout les provinces de l’est (celle de Québec, principalement), produit 75 % du marché mondial.

MULTIPLES ATOUTS

Dans les temps d’avant, bien avant que Jacques Cartier ne remonte le fleuve du Saint-Laurent, l’érable était une véritable panacée. Outre le sirop qui agrémentait nombre de plats, il fournissait du bois aux usages multiples : les autochtones pour lesquels les rivières vives n’avaient pas de secret, s’en servaient pour fabriquer des manches de harpons, des pagaies de barque, des pièges à poissons ; son écorce fibreuse finissait en cordes et paniers tandis que ses larges feuilles étaient récipients pour la nourriture. Enfin, en infusion, il soignait la toux. Aujourd’hui, où tout se fabrique à grande échelle, son bois à grain très fin est apprécié en menuiserie, pour des meubles et des jouets, des instruments de musique et des placages. 

DU CANADA ET DE CHINE

Les dix espèces d’érables connues au Canada comptent autant de grands arbres, dont la hauteur peut atteindre les 40 m (comme l’érable à grandes feuilles Acer macrophyllum) que de plus modestes arbustes (comme l’érable à feuilles rondes Acer circinatum). Tous sont à feuilles caduques poussant en paire, au limbe élégamment palmé ; au printemps, les bourgeons s’épanouissent en même temps que les fleurs, de couleur assez terne ; puis, l’automne, sortent les fruits ailés lourds de graines - ce sont des « samares » - qu’emporte le vent. En fait, si l’érable symbolise le Canada, c’est bien en Chine qu’il a trouvé son territoire : ici, s’épanouissent quelques 130 espèces, sur les 150 environ que compte le genre Acer dans le monde.  

ÉRABLES DE FRANCE

En France, les érables ne sont pas légion : la flore nationale compte cinq espèces, dont deux présentes dans le sud et l’est du pays. Ils n’ont pas davantage le panache automnal de leurs cousins canadiens. Pour autant, dans nos provinces du centre, l’érable champêtre Acer campestre encore appelé « Bois chaud » ou « Bois de poule » est quasi partout. La tête au soleil, il réclame des sols frais, plutôt calcaires. C’est un arbre rustique, autrefois recherché pour son bois dur, qui excellait dans la boissellerie, la fabrication de violons, d’arcs, et même de clous ; tout comme au Canada, on en appréciait aussi les « broussins », ces excroissances dues à des champignons du genre Rhytisma. Le bois qui en découle apparait alors tordu, pièce précieuse que l’ébéniste saura transformer en objets superbes. 

BEAUX SUJETS,  ESPÈCES ENVAHISSANTES

Comptent aussi l’érable plane Acer platanoïdes et l’érable sycomore Acer pseudoplatanus à l’écorce étiolée comme celle du platane ; tous deux habitent les parcs de château et de ville, s’alignent le long des routes en belles allées parfois majestueuses. Le bois du second étant reconnu, il eut vite fait d’être introduit en Amérique du Nord, Etats-Unis et Canada. Jusqu’à ce que l’on s’aperçusse qu’il y faisait des petits dans tous les sens, concurrençant les érables autochtones mais à tel point qu’il est désormais interdit de séjour en certaines régions. Comme en échange, le continent nord-américain nous envoya l’un des siens, habitué des grandes plaines : l’érable négundo Acer negundo. En France, le premier fut planté en 1732 ; à la suite de quoi, il gagna jardins et parcs de châteaux qu’il orne de ses ombrages complaisants. Aujourd’hui, il hante surtout les berges de nos grands fleuves dont les eaux charrient les graines légères. Mais si présent que les naturalistes le considèrent comme envahissant…

* René-François de Chateaubriand, Voyage en Amérique, 1791

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