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Analyse
La fin de la famine

Plaies de l’humanité : la préoccupation d’Homo sapiens a été la même pendant des milliers d’années, lutter contre la famine, les épidémies et la guerre. Des plaies qu’elle parvient à cicatriser contre vents et marées.

De génération en génération, les humains ont prié dieux, anges et saints ; ils ont inventé d’innombrables outils, institutions et systèmes sociaux... mais n’en ont pas moins continué de mourir par millions, victimes de la faim, de la maladie et de la violence. Nombre de penseurs et de prophètes en ont conclu que la famine, les épidémies et la guerre devaient être une partie intégrante du plan cosmique de Dieu... ou de notre nature imparfaite (« pauvre de nous ! »). Rien, sinon la fin des temps, ne nous en délivrerait. A l’aube du IIIe millénaire, pourtant, l’humanité se réveille sur le constat suivant : au cours des toutes dernières décennies, nous avons réussi à maîtriser la famine, les épidémies et la guerre. Certes, ces problèmes n’ont pas été totalement résolus, mais les forces incompréhensibles et indomptables de la nature sont devenues des défis qu’il est possible de relever (1).

 

Pour la première fois de l’histoire, on meurt plus de manger trop... que de manger trop peu ; malgré la Covid-19, on meurt depuis un demi-siècle plus de vieillesse... que de maladies infectieuses ; et les gens qui se suicident sont plus nombreux... que les victimes de tous les soldats, terroristes et autres criminels réunis. L’idée que les plaies traditionnelles de l’humanité soient sous contrôle paraîtra à certains exagérée, pour le moins naïve, voire obscène. Mais examinons de plus près notre monde du début du XXIe siècle.

 

Famines sporadiques en zones de guerre

Il y a encore peu de temps, la plupart des êtres humains vivaient à la lisière du seuil de pauvreté biologique, en deçà duquel on succombe à la malnutrition et/ou à la famine. Ouvrons n’importe quel livre d’histoire : en avril 1694, un agent d’affaires de Beauvais décrit les effets de la famine et de l’envol des prix des denrées alimentaires : « On ne voit plus à Beauvais qu’un nombre infini de pauvres, que la faim et la misère font languir, et qui meurent dans les places et dans les rues. »

 

Autour de 2,8 millions de Français - soit 15 % de la population d’alors - devaient mourir de faim entre 1692 et 1694, tandis que le Roi-Soleil batifolait à Versailles avec ses maîtresses. Idem en Estonie, en Finlande et en Écosse, pays nordiques qui ont perdu entre 15 et 20 % de leur population (petit âge glaciaire !). De nos jours, la plupart des gens n’a jamais enduré ce supplice de la famine, qui n’est en rien comparable au jeûne (rituel ou sanitaire). Au cours des derniers siècles, les progrès techniques, économiques et politiques ont tissé un filet de sécurité toujours plus robuste, protégeant l’espèce humaine du seuil de pauvreté biologique.

Il n’y a plus dans le monde de famines naturelles, mais uniquement des famines politiques. Si on meurt de faim en Syrie, au Soudan, en Somalie, etc., c’est à cause des guerres et des politiciens locaux. Si la France compte encore 6 millions d’habitants qui souffrent d’insécurité alimentaire, ça n’a rien à voir avec la famine. Dans les pires taudis de Beauvais ou de Paris, on ne meurt pas de faim parce qu’on est resté plusieurs semaines sans manger normalement. Tous les gens de ma génération gardent en mémoire le cas de la Chine : « Finis de manger ton morceau de pain, gamin, les petits Chinois n’en ont pas », dixit mon père. De l’Empereur jaune au Communisme rouge, la famine a frappé tous les régimes en Chine.

 

Lors de la Conférence mondiale de l’alimentation en 1974 à Rome, les délégués furent abreuvés de scénarios apocalyptiques : la Chine ne pourra jamais nourrir son milliard d’habitants (autre grossière erreur du club de Rome). En fait, elle s’acheminait vers le plus grand « miracle » économique de l’Histoire ; la Chine échappe désormais à la famine.

 

« La malnutrition en baisse dans le monde » (The Lancet 16 déc.2017). De fait, dans la plupart des pays, la suralimentation est aujourd’hui devenue un problème bien plus inquiétant que la famine. En 2014, plus de 2,1 milliards d’habitants étaient en surpoids, contre 0,85 milliard qui souffrait de malnutrition. En 2010, la famine et la malnutrition ont tué près d’un million de personnes, alors que l’obésité en a tué 3 millions ! La famine n’est plus une des plaies de l’humanité. Mais qu’en est-il des épidémies et des conflits ? A suivre.

 

(1) « Les hommes et les femmes de ce pays ne se résignent plus à la fatalité du malheur. » Propos déjà tenus en 1788 par un personnage du roman historique « Oser et brûler » de Gildard Guillaume.  

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