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L’agroforesterie coche toutes les cases

En apportant tout un panel de services écosystémiques, l’agroforesterie apparaît comme la voie d’avenir réconciliant l’agriculture avec les enjeux environnementaux.

Il suffit de consulter d’anciennes photos aériennes sur internet (site https://remonterletemps. ign.fr) pour constater combien l’arbre et la haie constituaient, en Val de Loire, des éléments majeurs du paysage rural. Bois pour construire et meubler, bois pour se chauffer, bois pour nourrir et ombrager les bêtes, bois pour délimiter, l’arbre c’était un peu la chicorée des campagnards, « un trésor de bienfaits ».

 

Malgré la rationalisation agricole planétaire, un quart de l’agriculture mondiale demeure agroforestière. Les arbres et les haies sont toujours là aujourd’hui mais leur densité et leur disposition ont changé, leur répartition est souvent moins diffuse et leur nombre s’est considérablement réduit au gré des remembrements. « En 1900, la France comptait 2 millions de kilomètres de haies, il en demeure 400 000 km désormais », indique Yves Gaborit, expert agroforestier de la Mission Bocage (Pays de Loire).

 

L’ARBRE, UN PRÉCIEUX ALLIÉ

Même si de l’Etat, des associations, des collectivités et parfois la profession agricole souffle un vent de renouveau pour le retour de l’arbre dans les cultures, il y a encore loin de la coupe aux lèvres quand les chiffres sont replacés en perspective. L’actuel plan national de relance va financer la replantation de 7 000 km de haies, alors qu’il continue d’en disparaître… 11 000 km/an. Ceci dit, un mouvement est lancé sous l’impulsion d’agriculteurs passionnés, d’acteurs associatifs, des chambres d’agriculture et des parcs naturel régionaux.

 

Mi-septembre, le parc naturel régional Loire Anjou Touraine organisait une journée technique agroforesterie et bocage pour rappeler la place de l’arbre dans les territoires ruraux. S’il peut gêner le passage des machines, les arbres sont surtout des alliés précieux de l’agriculteur dont on redécouvre les bienfaits. Pilier de la fertilité des sols, les arbres contribuent aux apports de matières organiques, tout en assurant les rôles de brise vent et de régulateur des eaux. Avec la haie, ils hébergent une faune multiple dont les auxiliaires de culture, de la chauve-souris aux carabes. Les études montrent que ce dernier parcours jusqu’à 30 m de part et d’autre de son habitat pour se nourrir de ravageurs polyphages comme les méligèthes.

 

L’Inrae a montré la faible concurrence pour l’eau entre les cultures et les arbres quant aux ombres portées, c’est un problème qui apparaît quand les arbres ont une vingtaine d’années. Les essences à feuilles caduques ne posent pas de problème à la croissance hivernale. Le choix de variétés précoces de céréales leur permet de pousser avant le déploiement des feuilles au printemps. L’ombre estivale non seulement peut être utile en période de canicule, mais là encore le choix de variétés tolérantes à l’ombrage apporte une solution acceptable pour l’agriculture.

 

DES INTERACTIONS BÉNÉFIQUES

Selon le PNR, un arbre agroforestier développe ses racines dans les horizons inférieurs non explorés par les cultures, surtout si cette descente est incitée par un travail de sol adéquat les premières années suivant la plantation. « Une parcelle de 10 ha en agroforesterie fabrique autant de produits agricoles et de bois qu’une surface de 16 ha avec cultures et arbres séparés », résume Christian Dupraz de l’Inrae à l’issue de quinze années d’études de systèmes agroforestiers.

 

Une affirmation qui vaut aussi pour la vigne, une liane forestière naturellement liée à l’arbre. En la cultivant de façon monospécifique, en l’éloignant de son biotope naturel, elle est fragilisée. Pour autant, comment réinstaller l’arbre dans le vignoble, toutes les réponses ne sont pas connues. En revanche, il est clair que biologiquement parlant, la densité, le mode de conduite des cultures posent problème. Tailler chaque année une liane dont l’objectif est de grimper pour aller chercher la lumière, n’est pas sans conséquence pour elle.

 

« L’arbre a été écarté à la fin du XXe siècle, car non intégré dans le schéma de modernisation agricole », souligne Yves Gaborit, en rappelant l’intérêt économique de l’arbre « dont il faut réimaginer l’utilisation locale en bois d’oeuvre » pour asseoir sa nouvelle légitimité. « L’agriculture du XXIe siècle sera double, agroécologique et agroforestière. Son assise repose sur quatre fondements : la culture des légumineuses source d’azote, l’allongement des rotations, le retour de l’élevage dans les systèmes et celui de l’arbre, entre autres, comme source de lignine. L’agriculture arrive au bout des artifices que sont la mécanique, la chimie et même parfois la génétique », indique l’agroforestier qui observe « qu’il y a de moins en moins de monde dans le club des 100 q ».

 

Pour lui, c’est une résultante logique de la dégradation de l’environnement des plantes cultivées. « L’agriculture dite moderne concentre tous les éléments favorables au développement du parasitisme. Or il est possible de récréer les conditions pour aller au potentiel du blé qui est de 160 q/ ha. L’arbre contribue à l’installation d’un microclimat favorable et avec le changement climatique, cela devient une évidence ».

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